Direction le cercle polaire arctique : double intérêt pour le team Newrest – Art & Fenêtres
Ce samedi 4 juillet, Fabrice Amedeo prendra le départ de la Vendée-Arctique-Les Sables d’Olonne, grande boucle Atlantique inédite de 3.566 milles qui mènera les 21 skippers inscrits aux abords du cercle polaire arctique via le Fastnet, avant de redescendre jusqu’aux Açores et de revenir en Vendée. Répétition générale avant le Vendée Globe dont le départ sera donné le 8 novembre prochain des Sables d’Olonne, la première course de la saison présente un double intérêt pour le skipper de Newrest – Art & Fenêtres : sportif d’une part et scientifique d’autre part.
Après de longs mois sans naviguer, Fabrice Amedeo a hâte de renouer avec le large à bord de son 60’ IMOCA Newrest Art & Fenêtres sur un parcours inédit. « Je suis hyper content de ce très beau parcours et de cette course, qui va nous préparer de la meilleure des manières au Vendée Globe, l’idée étant d’essayer d’avoir des conditions de vent fort à cette époque de l’année pour se préparer aux mers du Sud », commente Fabrice.
« C’est une très bonne chose, car avec le confinement, on est en manque de milles. J’ai réussi à faire quelques navigations mais je ne me suis pas préparé spécifiquement à cette course car l’objectif était vraiment de favoriser la préparation technique du bateau à quai pour qu’il soit prêt. La course va me permettre de m’entraîner et de progresser en vue du Vendée Globe. Il ne faut pas se tromper d’objectif : j’y vais avec des ambitions très mesurées qui sont de me réapproprier mon bateau, de retrouver des automatismes, de bien naviguer et d’essayer d’avoir confiance dans du vent fort ».
Un parcours inédit, une belle aventure
Imaginé par la Classe IMOCA et la société Sea to See pour remplacer la New York – Vendée, la course affiche un parcours intéressant sur le plan sportif, tout en étant empreint d’une dimension découverte et aventure.
« Avec l’Islande qui est un pays hyper fragilisé par le réchauffement climatique, on est dans le registre de la planète, en phase avec l’air du temps.
Je trouve que dans le monde du coronavirus ou de l’après coronavirus,
c’est bien de parler d’autre chose que de performance.
Cette course s’y prête bien.
C’est très excitant et une vraie aventure de monter jusqu’à 62°N, ce qui est beaucoup plus Nord que ne sera Sud sur le Vendée Globe. Le Cap Horn est 57°S et on ne descendra pas plus bas que 58°S.
À cette époque de l’année, il fera jour quasiment 24h/24.
Je suis ravi de découvrir de nouveaux endroits car je n’ai jamais navigué au nord de l’Irlande ».
Un intérêt scientifique
La Vendée-Arctique-Les Sables, dont le parcours inédit comprend un point de passage au sud-ouest de l’Islande, le waypoint IOC-UNESCO, à proximité du cercle arctique, est également une étape importante pour le volet scientifique du projet mené par Fabrice Amedeo, cette partie du globe étant encore relativement peu fréquentée par la communauté scientifique. Pour rappel, le skipper a installé des capteurs océanographiques à bord de Newrest – Art & Fenêtres, avec le soutien d’Éléphant Bleu et d’ONET. Ces capteurs permettent de mesurer la teneur en CO2, la température et la salinité en surface des océans, mais aussi de collecter des microplastiques. « Je trouve ça génial de démarrer la mission microplastiques sur cet itinéraire qui va permettre de prendre des mesures très Nord. C’est une grande première avec le nouveau capteur. La course est donc la grande répétition générale avant le Vendée Globe aussi bien pour la partie scientifique que pour la partie sportive », avance Fabrice.
Collecter des microplastiques…
La course permettra de donner le coup d’envoi de la mission microplastiques menée par Fabrice en collaboration avec l’IFREMER (lab. DCM), l’Université de Bordeaux (lab. EPOC et CBMN) et l’IRD (Lab. LOPS). « L’intérêt particulier de cette course est son parcours, avec un passage au cercle polaire, zone de convergence très peu documentée dont les données sont donc très attendues », avance Christophe Maes, Chargé de recherche à l’IRD (Laboratoire LOPS).
…mesurer la salinité et la température de l’océan en surface…
« D’un point de vue technique, le premier intérêt de la course est d’effectuer un dernier étalonnage du capteur océanographique. Il faut être certain que l’outil fonctionne au moment du départ du Vendée Globe », souligne de son côté Thierry Reynaud, ingénieur de recherche à l’IFREMER (LOPS). « D’un point de vue océanographique, le parcours emprunté par les marins va traverser le gyre subpolaire, qui est bordé au Sud par des courants chauds provenant duGulf Stream, et au Nord par des courants froids et peu salés effectuant le tour du Groenland vers l’ouest. Avec les hautestempératures observées dans l’Arctique, les navigateurs devront être prudents en franchissant le cercle polaire s’ils frôlent les côtes groenlandaises, car la fonte des glaces est précoce cette année. Une fonte des glaces massive pourrait limiter la formation d’eau profonde* en ralentissant les échanges de chaleur entre atmosphère et océan. Les données collectées par Fabrice seront intéressantes pour en mesurer l’avancement », poursuit-il.
…et la teneur en CO2 des zones traversées
La course permettra enfin de mesurer la teneur en CO2 des zones traversées, et notamment du cercle polaire qui est un « hotspot » pour le CO2, c’est-à-dire avec beaucoup de transferts de gaz entre atmosphère et océan. C’est une zone particulièrement intéressante à analyser, comme l’explique Toste Tanhua, Senior Scientist au Centre GEOMAR Helmholtz pour la Recherche Océanique. Selon lui, « l’autre point intéressant du parcours emprunté par cette course est le contraste entre le cercle polaire (hotspot) et les Açores (slow spot) où il y a peu de transfert de CO2 entre l’air et la mer, que les données collectées par Fabrice permettront de comparer ».
* La formation d’eau profonde dans l’Atlantique Nord est liée au refroidissement des eaux très salées, remontées par le Gulf Stream, depuis la mer des Caraïbes. Lorsque les eaux du Gulf Stream arrivent en mer de Norvège, elles subissent un brusque refroidissement. Ces eaux étant déjà très denses, à cause de leur salinité élevée (35,25‰), le refroidissement augmente encore la densité, ce qui est suffisant pour les faire plonger. (Source : Planet Terre)